COUR CONSTITUTIONNELLE –?ARRÊT N° 81/2020 DU 4 JUIN 2020

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COUR CONSTITUTIONNELLE –?ARRÊT N° 81/2020 DU 4 JUIN 2020

Jaar 2020 Volume 2020 Nummer 3-4 Pagina 529 Taal Frans Rechtscollege Grondwettelijk Hof - Cour Constitutionnelle - Arbitragehof - Cour d'Arbitrage, 04/06/2020 Referentie “COUR CONSTITUTIONNELLE –?ARRÊT N° 81/2020 DU 4 JUIN 2020”, APT 2020, nr. 3-4, 529-530 Samenvatting L'article 24, § 5, de la Constitution ne peut être interprété en ce sens qu'une ingérence dans un droit fondamental, dans un contexte d'enseignement, en vue de garantir le bon fonctionnement de l'enseignement et la réalisation du projet pédagogique d'une école, n'est possible que si cette ingérence fait l'objet d'une règle prévue par une norme législative. Une haute école organisée par une commune est tenue de respecter le principe constitutionnel de la neutralité de l'autorité publique. Bien qu'en principe, les communes, en tant que pouvoirs organisateurs de l'enseignement, soient compétentes pour établir le projet pédagogique des écoles qu'elles organisent, le législateur décrétal de la Communauté française peut, sur la base de la compétence attribuée aux communautés par l'article 127, § 1 er , alinéa 1 er , 2°, de la Constitution, imposer des conditions de subventionnement, pour autant qu'il ne soit pas porté une atteinte essentielle à la liberté d'enseignement. Les dispositions du décret du 17 décembre 2003 et, lorsqu'un pouvoir organisateur décide d'adhérer aux principes du décret du 31 mars 1994, les dispositions de ce dernier décret peuvent être considérées comme des conditions de subventionnement de l'enseignement concerné, qui, dès lors que les pouvoirs publics sont tenus de respecter le principe constitutionnel de la neutralité de l'autorité publique, ne portent en principe pas une atteinte essentielle à la liberté d'enseignement. Dans l'interprétation selon laquelle la disposition en cause confère aux communes qui ont adhéré au décret du 31 mars 1994 le pouvoir d'apprécier elles-mêmes si elles doivent ou non prévoir une interdiction totale faite aux élèves, fussent-ils majeurs, de porter des insignes, des bijoux ou des vêtements qui reflètent une opinion ou une appartenance politique, philosophique ou religieuse ainsi que tout couvre-chef, notamment ceux reflétant une telle opinion ou une telle appartenance, elle ne porte pas atteinte à la liberté de l'enseignement appartenant aux communes. Le Constituant n'a pas conçu la notion de «?neutralité?», à l'article 24, § 1 er , alinéa 3, de la Constitution, comme une notion statique. La notion a néanmoins un contenu minimum auquel l'on ne saurait déroger car l'obligation pour la communauté d'organiser un enseignement neutre constitue une garantie pour le libre choix des parents. Ce contenu ne saurait être considéré indépendamment du respect des conceptions philosophiques, idéologiques ou religieuses des parents et des élèves. La neutralité que les autorités doivent rechercher sur le plan philosophique, idéologique et religieux en vue de l'organisation de l'enseignement communautaire leur interdit plus précisément de défavoriser, de favoriser ou d'imposer des conceptions philosophiques, idéologiques ou religieuses. La neutralité suppose donc une reconnaissance et une appréciation positives de la diversité des opinions et des attitudes ainsi qu'un accent sur les valeurs communes. La notion de neutralité inscrite à l'article 24, § 1 er , alinéa 3, de la Constitution constitue une formulation plus précise en matière d'enseignement du principe constitutionnel de la neutralité de l'autorité publique. Le principe de neutralité entraîne, pour l'autorité compétente, dans certaines circonstances, une obligation positive d'organiser l'enseignement communautaire de telle manière que la reconnaissance et l'appréciation positives de la diversité des opinions et des attitudes et l'accent sur les valeurs communes ne soient pas compromis. Dès lors que le Constituant n'a pas conçu la neutralité comme un principe rigide, indépendant des évolutions de la société, l'interdiction pour les élèves de porter des signes religieux et philosophiques visibles dans un établissement d'enseignement donne à la notion de neutralité une orientation nouvelle qui n'est pas contraire par définition à cette notion. La disposition en cause, qui se borne à permettre à l'instance compétente pour établir le règlement intérieur d'un établissement d'enseignement de prévoir une interdiction totale de porter des signes convictionnels et philosophiques n'est pas contraire à l'article 24, § 1 er , alinéa 3, de la Constitution, ni au principe de la neutralité de l'autorité publique, applicable à l'enseignement organisé par les administrations décentralisées, lu en combinaison avec la liberté d'enseignement, telle qu'elle est garantie par l'article 24, § 1 er , alinéa 1 er , de la Constitution. La notion de «?neutralité?» n'étant pas conçue de manière statique par la Constitution, il faut en déduire que différentes conceptions de la «?neutralité?» peuvent être compatibles avec ce prescrit. Il n'appartient pas à la Cour de privilégier une conception de la «?neutralité?» par rapport aux autres conceptions envisageables. L'objectif qui consiste à assurer un bon déroulement du projet d'enseignement fondé sur la neutralité, auquel des élèves ou des étudiants ayant des convictions différentes participent de manière active et interactive, ainsi que l'objectif qui consiste à protéger les élèves ou les étudiants qui ne souhaitent pas rendre leurs convictions visibles contre la pression sociale qui pourrait être exercée sur eux par les personnes qui souhaitent rendre leurs convictions visibles peuvent justifier l'ingérence dans la liberté de religion que représente l'interdiction en cause.

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